Drôles de lutins méchants, presque souvent pervers, que ces frères Joel et Ethan Coen, qu’on ne peut pas tellement distancier. Drôle d’esprit, drôle de violence, drôles d’outrances : ces deux garçons sont capables de tout. Peut-être surtout de présenter au spectateur une réalité poisseuse, vaguement gênante, où il (le spectateur !) ne reconnaît plus vraiment son petit confort et s’éberlue de voir à l’écran de sales gens. Des gens qui lui ressemblent peut-être un peu, d’ailleurs. Et c’est là toute la question. (suite…)
Archive for the ‘Chroniques de films’ Category
Sang pour sang
mercredi, septembre 8th, 2021Alamo
vendredi, septembre 3rd, 2021Le pays de l’Étoile solitaire.
Les États-Unis (dits d’Amérique) ont toujours eu le chic (l’habileté, la roublardise) d’imposer au monde entier leur légende historique et d’en emplir les cerveaux naïfs jusqu’à imposer une vision univoque qui devient alors une vérité de foi révérée. Ainsi la baliverne qu’ils ont été les vainqueurs exclusifs du National-socialisme alors que c’est l’Union soviétique qui a porté les coups les plus durs à l’Allemagne hitlérienne. Ainsi les billevesées sur la défense du Monde libre en Corée, en Indochine ou à Cuba alors qu’ils ont à peu près à eux seuls salopé tout l’équilibre mondial et méprisé l’identité des nations. Ce qui leur retombe régulièrement sur le nez, comme on le voit aujourd’hui en Afghanistan, jadis au Vietnam. (suite…)
La maison du passeur
mercredi, septembre 1st, 2021C’est tout de même très curieux que l’excellente maison d’édition Carlotta films ait cru pouvoir proposer à la vente il y a quelques mois un coffret – fort bien présenté et documenté, il est vrai – qui réunit l’intégrale (ou presque) de la filmographie de Pierre Prévert. Ça n’en vaut vraiment pas la peine. Mais comme je me suis fait avoir, à cause d’un bon souvenir trop ancien de L’affaire est dans le sac, qui ne vaut pas tripette, finalement, je n’ai qu’à m’en prendre à moi et à épuiser toutes les ressources du coffret. Cette malédiction du coffret, je l’avais déjà ressentie avec une occasion proposant cinq ou six films de Jésus Franco dont bien peu avaient de l’intérêt ; mais qui, au moins, ne se haussaient pas du coude. (suite…)
Viva la vie !
mardi, août 31st, 2021Lelouchissime, c’es-à-dire nul !
Invraisemblable : la filmographie de Claude Lelouch doit bien compter 50 ou 60 titres et malgré les bides qui succèdent aux bides, il continue de tourner. Cela étant, il ne se fait plus d’illusion sur le succès de ses pensums puisqu’il offre l’entrée de ses dernières parutions aux spectateurs. Il y a quelque chose d’extraordinaire à ça, qui n’est possible que dans le système archi subventionné du cinéma français (quelquefois à bon escient, d’ailleurs) ; Jean-Pierre Mocky qui a connu la même diarrhée filmique est un autre exemple de l’utilisation du système. (suite…)
L’étrange Monsieur Victor
dimanche, août 29th, 2021Il ne faut pas oublier qu’à la base Jean Grémillon est musicien, qu’il a fait ses études à la Schola cantorum et qu’il conçoit ses films les plus ambitieux d’une façon harmonique où aucun des éléments qui les composent ne doit vraiment l’emporter sur les autres. En termes différents, à une époque où les projecteurs du cinéma français sont extrêmement orientés vers les acteurs et vers les dialogues, mais aussi vers des scénarios très composés, très solides, Grémillon tente de fondre tous ces points sans en privilégier l’un ou l’autre, tout en accordant à la lumière et aux images un poids qui singularise ses œuvres. Il lui était d’ailleurs reproché par la Critique d’être trop demeuré dans l’esprit très expressionniste du cinéma muet. (suite…)
Enemy
vendredi, août 27th, 2021L’araignée est dans le placard.
Mais que c’est lent et que c’est lourd, ce film pompeux, ennuyeux, solennel, fier de lui-même, qui fait mine de prendre le spectateur dans sa besace en pleine connivence mais qui ne parvient pas à ne pas l’ennuyer ! Denis Villeneuve, le réalisateur, doit estimer que la sophistication des intrigues suffit, par une sorte de clin d’œil, à enrégimenter tous ceux qui regardent et qui auront ainsi l’impression d’être intelligents, admis dans la grande cohorte des citoyens supérieurs. Si l’on ne comprend pas tout, surtout si on ne parvient pas à tout suivre des finesses exhibées à l’écran, c’est finalement tout bénéfice : personne ne pourra dire que le Roi est nu, comme seul le fait un enfant dans le conte d’Andersen. (suite…)
Ginger et Fred
jeudi, août 26th, 2021La tragédie n’est pas loin.
Sans doute tourné par Federico Fellini pour rendre, après Juliette des esprits, un nouvel hommage à la femme de sa vie, Giulietta Masina, l’avant-dernier film du réalisateur l’a aussi largement été pour faire pièce à la télé-poubelle importée en Europe par Silvio Berlusconi, en dénoncer les aberrations, en montrer les décors sordides. Tout cela prenait place en 1985. On peut dire que cet aspect, si déprimant, exaspérant qu’il est a perdu beaucoup de sa virulence. Car, qu’on le veuille ou non, nous nous sommes habitués à la débilité méprisante (pour leurs participants et pour les spectateurs) de ces émissions qui fleurissent désormais sur presque toutes les chaînes. Koh-Lanta, Les Marseillais contre le reste du monde (ou les Chtimis, d’ailleurs), Quatre mariages pour une lune de miel, voilà ce qui passe tous les jours et qui marche un maximum. En tout cas pour les vieux qui regardent encore la télé, les jeunes ayant déjà migré vers autre chose. Ce qui est d’ailleurs assez drôle puisque la télé-poubelle a largement contribué à tuer le cinéma comme loisir populaire. (suite…)
Casanova, un adolescent à Venise
mardi, août 24th, 2021Lorsque le film commence, en 1733, Casanova, né en 1725, est âgé de 8 ans. Lorsqu’il s’achève, en 1742, il en a 17 et il a décidé, pour réussir sa vie, à ne pas suivre la voie ecclésiastique qui lui était promise et où il aurait été éclatant, mais celle de son plaisir. C’est d’ailleurs peu dire que, pendant de longues années, il y réussira parfaitement, avant d’achever son existence dans des tonalités bien plus sombres, en 1798, à Dux, en Bohême, dans l’exil, la pauvreté et l’abandon. Un aventurier éclatant et séduisant, une image de ce que fut notre Civilisation. (suite…)
L’entreprenant M. Petrov
samedi, août 21st, 2021Les esprits grincheux pourront bien avancer que les films féeriques qui mettent en scène Fred Astaire et Ginger Rogers étaient des paravents commodes pour dissimuler au monde que les États-Unis connaissaient, depuis novembre 1929, une crise épouvantable dont ils ne sortiraient que grâce à la guerre ; les puristes se moquer des scénarios funambulesques et invraisemblables des comédies musicales ; les penseurs profonds déplorer que le genre ne présente – ou presque – que des gens favorisés par la Fortune, riches et beaux, qui vivent une vie qui n’a rien de commun avec les tristes réalités ; les esprits forts se gausser que, à des moments donnés et fréquents, le récit s’interrompe pour laisser la place à une séquence chantée ou dansée.
Hiroshima mon amour
vendredi, août 20th, 2021J’étais bien trop jeune, en 1959, pour aller regarder un film qui fit alors quelque bruit ; et si j’avais été en âge de choisir les spectacles que j’étais admis à voir, j’aurais sûrement pensé qu’il pouvait s’agir d’un documentaire sur la bombe atomique ou, au mieux, sur un monstre affreux surgi des horreurs de la radioactivité (du type Rodan). Mais qu’est-ce qui m’a fait me méfier et passer mon tour, cinq ou six ans plus tard, lorsque le film d’Alain Resnais est passé dans les cinémas d’art et d’essai et que de graves professeurs nous ont conseillés d’aller découvrir Hiroshima mon amour ? Peut-être une sorte d’intuition de bon sens, un refus de céder à la gugusserie ambiante et à la jactance universelle. (suite…)