Archive for the ‘Chroniques de films’ Category

Inheritance

dimanche, avril 12th, 2020

Logique de la catastrophe.

Deuxième volet de la trilogie consacrée par le cinéaste danois Per Fly aux classes sociales. Après The bench (Le banc) qui traite de ce qu’on appelle aujourd’hui les travailleurs pauvres (c’est-à-dire ce que le capitalisme mondialisé a rejeté dans les marges), voici Inheritance (L’héritage) qui se passe dans les classes bourgeoises supérieures mais qui, somme toute, dénonce d’une façon similaire les mêmes ravages. Car finalement, voilà que l’entreprise sidérurgiste familiale Borch-Moll, à taille à peu près humaine, paternaliste (c’est-à-dire soucieuse de l’individualité de chacun de ses membres) est contrainte d’entrer dans le cycle infernal habituel : réduction sauvage des effectifs puis processus de fusion-acquisition avec une entreprise étrangère qui n’aura pas les mêmes soucis éthiques de la dignité des travailleurs. (suite…)

La Bible

samedi, avril 11th, 2020

La plus belle histoire jamais contée.

La fin de la carrière de Marcel Carné n’est pas un chemin de lys et de roses. Les esprits hâtifs concluront que c’est grâce à la présence à ses côtés de Jacques Prévert qu’il a pu tourner ses grands films, de Drôle de drame aux Portes de la nuit (en faisant mine d’oublier, d’ailleurs, qu’Hôtel du Nord ne doit rien à Prévert). Mais alors que dire de La Marie du portThérèse RaquinL’air de Paris et même de Du mouron pour les petits oiseaux, eux aussi tournés sans le concours de l’auteur de Paroles ? Cela étant on sent tout de même un essoufflement et, malgré de grands succès publics (Les Tricheurs), on sent que la route commence à descendre. (suite…)

Le faiseur de pluie

jeudi, avril 9th, 2020

Tout finit comme il faut.

Le film est adapté d’une pièce de théâtre à succès d’un nommé N Richard Nash, dont je vois par ailleurs qu’il a collaboré au scénario d’Hélène de Troie de Robert Wise, ce qui ne me semble pas suffisant pour lui assurer une notoriété similaire à celle de notre vieux camarade Homère. Et comme la presque totalité des films directement transposés de la scène à l’écran, ça se sent dès les premières images : une certaine raideur du récit, les entrées et sorties des protagonistes qui interviennent avec une régularité d’horloge, les tête-à-tête qui permettent aux personnages de présenter leur discours et je ne sais quelle atmosphère totalement artificielle qui fait qu’on ne peut pas marcher, fût-ce avec de la bonne volonté et de la sympathie pour les acteurs. (suite…)

Volver

mercredi, avril 8th, 2020

Femmes sans hommes.

J’ai ouï dire, il me semble (mais je n’en suis pas certain) que Pedro Almodovar est homosexuel, ce qui n’est pas un choix (ou, comme on dit aujourd’hui une orientation) mais une donnée de nature. Et François Ozon est également homo, sans conteste. Qu’est-ce que vous allez chercher là, qu’est-ce que ça vient faire ici, vil réactionnaire ? êtes-vous dès lors à deux doigts de me dire en retroussant vos babines sur vos canines aiguisées prêtes à me déchirer sur l’autel immarcescible du droit à la différence et du politiquement correct(suite…)

Rocco et ses frères

mardi, avril 7th, 2020

Tagliatelles et risottos

Comment se fait-il que ce mélodrame larmoyant, plutôt bien interprété et bien filmé, mais interminable (192 minutes !!!) et incohérent ait remporté un tel succès critique ? Sans doute, comme Luchino Visconti est une des vaches sacrées du 7ème Art, à l’instar d’Alfred Hitchcock et d’Ingmar Bergman, ne peut-on élever le moindre doute sur la qualité intrinsèque de Rocco et ses frères. Il y avait pourtant un sujet magnifique et passionnant à exploiter au détriment du pitoyable récit de sentimentalisme bébête et de grosses ficelles romanesques : brebis galeuse saccageant l’harmonie d’une famille, présence d’une gourgandine au rôle fatidique et destructeur, bien qu’elle soit par ailleurs assez bonne fille…

(suite…)

Michel Strogoff

dimanche, avril 5th, 2020

Le royaume de Borée.

Ah là là, qu’est-ce que les petits enfants de France ont pu rêver aux steppes infinies, aux verstes, au knout, aux boyards, aux moujiks, aux isbas, aux cosaques, à la Sainte Russie, à tout ce que l’exotisme proche, à la fois inquiétant et séduisant qu’offrait cet immense pays qui les fascinait et qui était fasciné par nous ! De Pierre le Grand qui vint chercher à Versailles l’inspiration de Saint Pétersbourg à Alexandre III pour qui fut bâti un  des plus extraordinaires ponts de Paris, voilà une histoire d’amour confondante, à quoi Michel Strogoff n’est pas étranger ! (suite…)

Cocagne

dimanche, avril 5th, 2020

En roue libre et en pente douce.

Un très ennuyeux film qui démontre, s’il en était besoin, aux nostalgiques que le cinéma d’avant connaissait lui aussi de bien médiocres compositions…

Ça commence, et c’est le moins mauvais, par une de ces nombreuses provençalades qui sont entièrement tournées sur la galéjade, le pastis, les parties de boule, les engueulades amicales et portées par un groupe de comédiens blanchis sous le harnais. Et en premier lieu, bien sûr, par Fernandel dont la seule présence assurait aux producteurs et distributeurs un confortable petit noyau de spectateurs prêts à marcher et à se rendre dans les salles sur le seul nom de l’acteur. Et d’ailleurs il y a eu presque deux millions de gogos qui se sont laissé avoir. (suite…)

La chambre bleue

vendredi, avril 3rd, 2020

La voie des masques.

Le cinéma a fait une riche moisson dans les histoires d’amants criminels qui, constatant que leurs époux et épouse respectifs constituent une grave gêne pour leurs voluptueux radadas se résolvent, sans y voir malice, à envoyer ad patres ces obstacles exaspérants. J’ai l’assez médiocre film de Claude Chabrol Les noces rouges en tête, comme ça, sur le moment mais on devrait pouvoir en dresser une liste considérable. Une liste qui emprunterait à tous les pays et à toutes les époques. Après tout, la situation est d’une telle banalité et les velléités fantasmatiques si vraisemblables (on n’ose pas dire si compréhensibles) qu’on n’est pas mécontent de trouver représentée au cinéma une folie si commune. (suite…)

La fiancée du monstre

jeudi, avril 2nd, 2020

Le fin fond du marécage.

L’épidémie de coronavirus et le confinement subséquent n’ont pas que de mauvais côtés : comme on ne peut guère sortir de chez soi, on regarde tout ce qui passe à portée de l’œil. Tout, mais aussi n’importe quoi. Le réalisateur Ed Wood bénéficie d’une certaine notoriété auprès des amateurs de cinéma bizarre et marginal, qui est bien au delà de la série B, et confine à la série Z ; un cinéma de bric et de broc, financé avec trois francs, six sous et tourné avec des bouts de ficelle. Films qui ne se soucient ni de la vraisemblance, ni de la cohérence, qui présentent des acteurs minuscules dans des aventures un peu ridicules mais assez violentes, voire sanglantes.

(suite…)

Le dimanche de la vie

mercredi, avril 1st, 2020

Sans queue ni tête, mais avec DD.

L’hétéroclite, le biscornu, le parodique font bon ménage chez lui avec la règle et l’ordre ; c’est ainsi que La Pléiade présente les Œuvres complètes de Raymond Queneau dans la célèbre collection. Est-ce que les textes de ce funambule touche-à-tout sarcastique et spirituel sont adaptables au cinéma ? Je n’en suis pas convaincu. Déjà l’adaptation par un grand réalisateur, Louis Malle, de son roman le plus célèbre, Zazie dans le métro m’avait paru bien à côté de la plaque et très décevante, ennuyeuse même. Le film a connu pourtant un bien grand succès. Mais que dire alors de ce Dimanche de la vie mis en scène par le bien moins notoire Jean Herman ? (suite…)