Author Archive

Garde à vue

samedi, août 23rd, 2014

Sombre, noir et tellement brillant…

L’intelligence du film de Claude Miller est de prendre en cours l’affaire : le meurtre et le viol de deux petites filles découvertes, quelques semaines auparavant dans la désolation d’une Normandie de fin d’automne, l’une sur une plage, l’autre dans un terrain vague. À ce stade là de l’instruction, le notaire Martinaud (Michel Serrault) a déjà été entendu plusieurs fois par la police, a commenté son emploi du temps des jours des crimes. La pluie tombe dru sur les toits de zinc du commissariat : on entre d’emblée dans le vif des choses, parce que l’inspecteur Gallien (Lino Ventura) n’a pas à tout récapituler

(suite…)

Un homme est passé

jeudi, août 21st, 2014

L’Amérique insolite.

Je suis assez partagé entre une grande admiration pour la captation d’une atmosphère poussiéreuse, gluante, étouffante et bornée et par le jeu d’acteurs légendaires tous excellents et, à l’inverse, par une certaine déception sur le scénario bien banal et moralisant et une mise en scène très théâtrale, les protagonistes ne cessant de se croiser comme il faut dans les endroits où il faut qu’ils soient. Je pensais et pense toujours que ce genre de défaut, dans un film est facile et fréquent lorsqu’il s’agit d’une adaptation théâtrale, mais je n’imaginais pas qu’il pût exister au cinéma.

(suite…)

Comment réussir… quand on est con et pleurnichard

mardi, août 19th, 2014

Le velours de l’estomac.

Si le titre, Comment réussir… quand on est con et pleurnichard, du pénultième film réalisé (si l’on peut dire !) par Michel Audiard est beaucoup moins intéressant que les premiers tournés (ah, la poésie baroque du Cri du cormoran le soir au dessus des jonques), le scénario a un peu plus de vivacité et d’allure et je crois bien que, sans atteindre des sommets, bien loin de les atteindre, les mésaventures du vendeur de Volcani, vermouth frelaté en proposant en prime un carillon Westminster immonde est un bien intéressant personnage minable.

(suite…)

L’alibi

mardi, août 19th, 2014

Belle atmosphère.

Il ne faut pas du tout entrer dans l’intrigue policière, qui est à la limite de l’invraisemblable et qui n’offre pas beaucoup d’intérêt. L’alibi dont il s’agit et qui donne son titre au film est un procédé narratif cousu de fil blanc (j’admets que mon image est hardie et très excessive).

(suite…)

La marquise d’O

mercredi, août 13th, 2014

Exercice de beau style.

Éric Rohmer ne déteste pas s’embarquer sur des vaisseaux sans réalité et dans des histoires sans vraisemblance. Des histoires nourries de hasards et de rencontres improbables. Ce qui compte pour lui, une fois les prémisses posées et le point de départ admis, c’est la cohérence des élans et des égarements du cœur et de l’esprit.

(suite…)

Shining

dimanche, août 10th, 2014

Quantus tremor est futurus…

Comme toujours, on est entré dans la salle en se disant, comme pour tous les Kubrick qu’on avait déjà vus, on allait être déçu. Comme toujours on a été déçu parce que le film ne se pliait pas à ce qu’on pensait qu’il devait être (un film de science-fiction, une reconstitution historique, un film d’épouvante…). Comme toujours, quelques heures après la sortie de la salle on avait commencé à changer d’avis. Comme toujours on a vu et revu Shining, comme on a vu et revu tous les autres…

(suite…)

Fais moi très mal mais couvre moi de baisers

samedi, août 9th, 2014

60782Un Risi en très mineur.

Fais-moi très mal mais couvre-moi de baisers est un des plus médiocres Risi qu’il m’ait été donné de voir ; naturellement ce point de vue est à l’aune de l’immense talent du réalisateur et doit être donc relativisé ; si par miracle, touché par on ne sait quelle grâce, l’ennuyeux Antonioni ou le pompeux Visconti avaient tourné ça, je n’aurais pas hésité à mettre la note maximale. Mais le monde est ainsi fait et vit de comparaisons ; sans pouvoir attendre d’un cinéaste qu’il tourne toujours des merveilles aussi absolues que Le fanfaron ou des chefs-d’œuvre comme Les monstres ou Au nom du peuple italien, j’attendais mieux de lui…

(suite…)

Le fabuleux destin d’Amélie Poulain

jeudi, août 7th, 2014

Miracle à Montmartre.

J’ai l’impression qu’il est de bon ton aujourd’hui, une douzaine d’années après la sortie du film, de chipoter sur Le fabuleux destin d’Amélie Poulain, d’afficher un certain mépris pour le succès qu’il a rencontré et de se gausser sur les bouffées de bonheurs minuscules et délicieux suscitées chez ses millions de spectateurs. Il est vrai qu’à l’époque un critique crapoteux des Inrockuptibes (pléonasme, non ?) avait dénoncé une complaisance du film de Jeunet en faveur de la Lepenisation des esprits, parce que les vues de Montmartre n’étaient pas assez ethniquement métissées et ne montraient pas suffisamment les minorités visibles de la Capitale. À ce degré de connerie, on a un peu honte que ce journal de la bien-pensance soit encore édité. (suite…)

Mammy

mercredi, août 6th, 2014


Étrange mélodrame narquois.

Gaby Morlay occupe une place un peu à part dans le paysage cinématographique français. Née en 1893, elle a commencé très jeune une carrière d’artiste, mais elle n’était pas loin de la quarantaine lorsque le cinéma est devenu parlant et ne pouvait plus, dès lors, jouer les ingénues ; son physique assez paisible et harmonieux ne pouvait pas davantage lui permettre de jouer les séductrices un peu mûres, comme y réussirent à merveille Françoise Rosay (née en 1891) ou, plus tard Edwige Feuillère (née en 1907) ou Viviane Romance (née en 1912). En revanche elle a été parfaite pour interpréter les femmes honnêtes tentées un court instant par le vertige de la faute (Un revenant, en 1946 – elle a 53 ans – avec Louis Jouvet, Papa, maman, ma femme et moi, en 1955 – elle a 62 ans – avec Michel Etcheverry).

(suite…)

Le goût des autres

lundi, août 4th, 2014

Le sourire d’Anne Alvaro…

C’est bien dommage qu’Agnès Jaoui soit tout, sauf une réalisatrice et qu’elle n’ait pas confié à un vrai metteur en scène le tournage d’un film qui, pour une fois, n’était pas l’adaptation d’une pièce de théâtre mais une œuvre originale intelligente, subtile, profonde, souvent émouvante et magnifiquement interprétée. Ça sent encore un peu trop les conventions de la scène (par exemple cette manie de faire se retrouver les protagonistes à tout bout de champ dans le même bistro ; je sais : c’est là que se nouent les intrigues, mais c’est tout de même artificiel et maladroit), mais ça s’échappe enfin, après Cuisine et dépendances et Un air de famille à la restriction de l’intrigue dans un cadre trop étroit. Et malheureusement, Agnès Jaoui ne retrouvera pas ensuite la qualité du Goût des autres en s’égarant dans des récits moins harmonieux, avec Comme une image et Parlez-moi de la pluie (je n’ai pas vu sa dernière production, Au bout du conte).

(suite…)