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Trouble every day

dimanche, octobre 2nd, 2022

Le goût de craie du sang.

On ne sait pas trop ce qu’il faut apprécier dans un film aussi singulier, choquant et bizarre. On se demande ce qu’il est réellement, ce qu’il apporte au cinéma ; on finit par se résoudre à apprécier ses circonvolutions sans être tout à fait dupe. D’autant plus qu’il est bien filmé, bien distribué et qu’il bénéficie d’un accompagnement musical tout à fait adapté, à la fois lourd, innocent et fatidique (je conçois parfaitement que ces trois adjectifs accolés paraissent contradictoires mais ils situent pourtant avec exactitude la recréation de l’atmosphère qui pèse sur Trouble every day). N’empêche qu’on y est assez mal à l’aise, du début à la fin et que le partis-pris de Claire Denis, la réalisatrice, d’expliquer le moins possible le déroulement de l’intrigue et le comportement des personnages ne va pas forcément dans le bon sens. (suite…)

À ma soeur

jeudi, septembre 29th, 2022

Le destin des petits boudins.

Voilà bien le premier film que je regardais de Catherine Breillat qui, par sa jactance et ses outrances avait naguère conquis une certaine position dans le cinéma d’auteur. Je ne conteste pas à la dame un réel talent de scénariste (Et vogue le navire, un des meilleurs films de Federico Fellini); mais je ne suis vraiment pas certain que j’aurai envie de découvrir toute la filmographie de la dame, qui me semble tellement obsédée par la sexualité qu’elle fait d’une activité extrêmement agréable le pilier central et pesant de la vie humaine. Sans doute est-ce son affaire et on ne peut pas le lui reprocher, mais elle me semble un peu similaire à Roger Peyrefitte, gracieux écrivain qui ne voyait les choses qu’à travers le prisme de sa pédérastie. Chacun sa croix !

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Carré de valets

jeudi, septembre 29th, 2022

Tout est possible.

Ai-je déjà vu un film plus idiot et plus insignifiant que ce Carré de valets du prolifique André Berthomieu ? Un réalisateur qui n’a pas tourné que des bêtises et qui a réussi, par exemple, un assez bon Mort en fuite en 1936, avec Jules Berry et Michel Simon ; mais un réalisateur de grande série voué au cinéma du samedi soir, c’est-à-dire à la facilité absolue, qui procurait au brave public des salles périphériques son content d’émotions, de battements de cœur et de grosse rigolade. Tout pour plaire, en quelque sorte : des acteurs un peu notoires, en tout cas bien reconnaissables (même si on ne se rappelait pas forcément leur nom), une intrigue assez facile à suivre et in fine, la retrouvaille des amoureux que le mauvais sort avait pu un instant dissocier. (suite…)

Le conformiste

samedi, septembre 24th, 2022

La fleur aux dents.

Je ne méconnais pas du tout les immenses qualités du Conformiste. Des acteurs (et donc une direction d’acteurs) remarquables, un Jean-Louis Trintignant qui interprète là, assurément, un de ses rôles les plus éclatants. Mais bien d’autres choses aussi : comme il y a eu beaucoup de moyens financiers, on n’a pas mégoté sur tout l’environnement : des costumes admirables de Gitt Magrini (qui en a réalisé tant et tant, notamment ceux de Peau d’âne de Jacques Demy), costumes féminins élégants, ondoyants, œuvres d’art presque à eux tout seuls. (suite…)

Marguerite

vendredi, septembre 23rd, 2022

Fragments de paradis.

Je n’imaginais pas que Catherine Frot, parfaite actrice de complément, de second rôle, comme on disait jadis, pût porter aussi bien sur ses épaules le rôle d’une cinglée très sympathique inspirée d’un personnage réel. Une Étasunienne richissime et foldingue, Florence Foster Jenkins qui, dotée d’une voix abominable ne rêvait que d’art lyrique. Et qui, grâce à ses millions, parvenait paraît-il, à se faire entendre lors de matinées huppées où elle glapissait les plus belles œuvres du grand répertoire devant un public qui se retenait de se moquer mais s’empiffrait de grands crus de champagne et de petits fours délicieux. (suite…)

Les violents

mercredi, septembre 21st, 2022

Ron ron, petit patapon !

Assez curieux film, au titre bien médiocre et à l’intrigue excessivement compliquée. Le réalisateur, Henri Calef a tourné un film assez bien fait sur la fin de l’Occupation et le drame d’otages prisonniers, Jéricho. Et il a consciencieusement massacré Les chouans, un des premiers et des plus mauvais romans d’Honoré de Balzac.Calef est un de ces bons artisans du samedi soir qui ont fait florès dans la France tranquille de l’après-guerre. Un ouvrage consciencieux, des acteurs paresseusement dirigés, une intrigue compliquée, une énigme qui se résout à la fin au mieux, après qu’on a tremblé pour les héros. On rentre dans son trois-pièces au cinquième étage sans ascenseur, tout content d’avoir dégusté son esquimau Gervais et son sachet de bonbons Kréma. Et, dès le lendemain, on partira contribuer au miracle économique français. Le plus drôle, c’est que c’est tout à fait ça. (suite…)

Les fleurs de ShanghaÏ

lundi, septembre 19th, 2022

Ennui imbécile et décoratif.

Je suis tombé sur ça un peu par hasard sur un site de VOD. Je n’avais rien d’autre à faire et l’accroche du site qui proposait le film m’émoustillait. Elle évoquait, dans la Chine pourrie de la fin du 19ème siècle, des histoires se passant dans des bordels de qualité, au milieu des fumées de l’opium. Le cochon depuis longtemps endormi en moi, a ouvert à demi un œil las et j’ai commencé à regarder. Le nom du réalisateur, Hou Hsiao-hsien ne me disait évidemment rien mais j’ai lu, dans la traîtresse accroche de présentation qu’il était un notoire metteur en scène taïwanais et qu’il avait présenté son film au festival de Cannes. Ça n’était gage d’absolument rien, mais il se pouvait que, finalement, ce soit une bonne surprise. Les marécages du marketing et la nécessité de convier sur la Croisette d’inutiles films exotiques, si pavés de bonnes intentions qu’ils sont, peuvent quelquefois avoir la main pas trop malheureuse. (suite…)

La prise de pouvoir par Louis XIV

mercredi, septembre 14th, 2022

Le soleil, ni la mort…

Et voilà qu’à un moment vers 1961, 1962, le grand, l’immense Roberto Rossellini quitte à peu près définitivement le cinéma des écrans, le cinéma qui lui a permis de réaliser d’étonnants et arides chefs-d’œuvre : Rome ville ouvertePaïsaAllemagne année zéroStromboliEurope 51. Ça ne l’intéresse plus, désormais. D’ailleurs, il n’a jamais aimé les acteurs. Et il est vrai qu’avoir vécu avec des personnalités comme Anna Magnani (la brûlante) et Ingrid Bergman (le feu sous la cendre) conduit à penser que les anonymes peuvent bien être suffisants pour un film que le réalisateur illuminera. (suite…)

La Cosa

mardi, septembre 13th, 2022

Pour public averti.

Voilà qui n’est pas à mettre devant tous les yeux. Et cela non pas du fait d’images choquantes, vulgaires, cruelles ou pornographiques (sauf à étendre ces notions très loin !) ! Mais parce que 59 minutes consacrées, en plans quasiment tous frontaux, à l’expression de militants communistes italiens convoqués par leurs cellules à s’exprimer sur les propositions du Parti qui seront adoptées au Congrès de Bologne de mars 1990, peut ne pas présenter beaucoup d’intérêt pour la plupart. Sauf pour les maboules comme moi qui sont fascinés par le sort des partis communistes occidentaux. (suite…)

Jason et les Argonautes

lundi, septembre 12th, 2022

Les pères de notre esprit et de notre goût.

Si l’on n’est pas ici attiré par le nom révéré de tous les amateurs d’effets spéciaux de Ray Harryhausen, on peut tout à fait passer son tour. Non que le film soit désagréable, loin de là ! Déjà les paysages sublimes et très bien mis en valeur des îles sèches de la Méditerranée valent le regard. Puis la beauté de certains décors, notamment l’intérieur du temple de la déesse Hécate, trouble, chatoyant, angoissant. Enfin la fidélité (relative) au mythe très archaïque de la quête de la Toison d’Or par une bande de reîtres prête à tout.

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