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Quand la ville dort

jeudi, avril 3rd, 2014

Concours de crapules.

On peut se demander quelle version du titre, anglaise ou française, caractérise le mieux le film de John Huston. The asphalt jungle, qui est le nom du roman de W.R. Burnett dont est tiré le récit met davantage l’accent sur l’incertitude, l’inquiétude portée par tous les personnages, friables et menacés. Quand la ville dort donne une image pleine d’angoisse et de mystère, marque le côté sournois, secret, sombre de ce qui se passe quand les honnêtes gens ont disparu du premier plan ; et, de fait, on ne voit jamais aucun passant attardé dans les rues vides à la géométrie impeccable.

Gardons les deux titres en mémoire et allions-les dans ce film d’une intelligence aiguë, qui ne se contente pas d’être la relation d’un casse, mais en présente tous les préalables, les à-côtés et les prolongements avec la même intensité. (suite…)

Poisson d’avril

samedi, mars 29th, 2014

Bien mince.

Tombé là-dessus au hasard d’un paresseux zapettage (ou d’une paresseuse zapperie ?) qui m’a arrêté sur la chaîne enfantine Gulli, que je ne fréquente pas, qui passait ensuite le calamiteux (presque calamiteux) Ignace, de Pierre Colombier, avec un Fernandel lâché sans frein dans le cloaque du comique troupier d’avant-guerre. (suite…)

À propos de Nice

jeudi, mars 27th, 2014

s1641228Les humeurs de la mer.

Il est bien certain que si Jean Vigo n’était pas mort prématurément (à 29 ans) après avoir donné la merveilleuse Atalante, À propos de Nice, ce court métrage qui est sa première réalisation (à 24 ans) ne serait pas édité dans le beau coffret DVD paru il y a quelques années. Est-ce que Nogent, Eldorado du dimanche, qui présente certaines analogies, est qui est le premier film de Marcel Carné a eu l’honneur d’une édition ? (suite…)

Rendez-vous avec la peur

lundi, mars 24th, 2014

La peur, tranquillement…

On n’est vraiment pas loin du chef-d’œuvre, ce qui prouve, s’il en était besoin, que n’importe quel style de cinéma peut transporter, faire frémir, exalter, émerveiller et que les moyens d’un film n’ont pas besoin d’être exceptionnels pour capter l’attention. Jacques Tourneur dont il faut que je revoie bientôt Vaudou et La féline et découvre L’homme léopard ou Angoisse réalise un film d’une grande intelligence qui saisit avec habileté les ressorts de nos propres peurs. (suite…)

Une histoire vraie

jeudi, mars 20th, 2014

Réaliste et intimiste.

Si immense est le talent de David Lynch qu’il peut ainsi aller à contre-courant de l’orientation générale de son œuvre cinématographique, prendre ses admirateurs à contre-pied et donner, entre Lost highway et Mulholland drive ce petit bijou humaniste et serein d’Une histoire vraie. Le regard sombre, noirâtre même souvent, pessimiste, halluciné, dubitatif sur la nature humaine se transforme, avec la même puissance de conviction, en une profession de foi confiante, émouvante, rayonnante sur le bonheur de l’altruisme et de la réconciliation. (suite…)

L’eau vive

mardi, mars 18th, 2014

Avant le barrage.

Jean Giono reprend en 1958 le beau titre qu’il avait en 1930 donné à un court texte publié par La Nouvelle revue française où il célébrait le rémouleur, le potier, le flotteur de bois, le fontainier (un peu comme l’a fait Alain Cavalier avec ses 24 portraits), mais de la façon très lyrique de sa première manière. En 1958, donc, sur une commande reçue d’EDF qui est en train de construire le barrage de Serre-Ponçon destiné à canaliser la folle Durance et à assurer l’approvisionnement en eau de ces terres rudes et sèches (je le sais : j’en suis et ma tombe de famille est à Château-Arnoux !), Giono écrit et dialogue un film qui sera réalisé par François Villiers. (suite…)

La nuit américaine

dimanche, mars 16th, 2014

Entre journées épiques et nuits cauchemardesques.

S’il y a une infinité de films où sont montrés ou projetés d’autres films, en manière de citation ou d’allusion, je ne suis pas certain qu’il y en ait tant que ça consacrés à la mécanique cinématographique, à la façon dont on tourne, à cet artisanat qui exige tant de métiers et tant de monde. Je pense au Silence est d’or, un petit peu à Chantons sous la pluie. Mais sans doute rien qui ait cet aspect presque documentaire de La nuit américaine qui met en valeur l’assistant metteur en scène, l’accessoiriste, la script-girl et même le producteur délégué. Aucun qui montre la fébrilité du réalisateur, sans cesse sollicité par des questionnements invraisemblables, hétéroclites et exaspérants, sans cesse enquiquiné par des guignes, des contretemps, des catastrophes, sans cesse à courir contre le temps qui passe, les humeurs des collaborateurs, les caprices des acteurs. (suite…)

Femmes entre elles

mercredi, mars 12th, 2014

Mention passable.

La tonitruante Journée de la femme venant d’avoir lieu, ornée de ses éternels lieux communs et de ses éternelles pleurnicheries, je me suis dit qu’il était opportun de regarder un film qui, selon le texte de présentation de son édition DVD est une chronique des relations délétères au sein d’un groupe de femmes (pour rester dans le lieu commun, je dirais qu’il s’agit là d’une expression pléonastique). Michelangelo Antonioni, aux temps où les Cahiers du cinéma bavaient sur lui d’adulation (L’Avventura, La nuit, L’Éclipse) et crachaient sur Henri Verneuil et Gilles Grangier m’avait paru être un de ces faiseurs qui ont empuanti le cinéma au même titre que l’heureusement récemment disparu Alain Resnais et toute sa cohorte. Femmes entre elles est de quelques années antérieur aux films cités et n’en comporte assurément pas tous les travers irritants de vacuité et d’inconsistance. (suite…)

Lost in translation

lundi, mars 10th, 2014

Charme et délicatesse.

C’est vraiment un film d’une intelligence, d’une élégance, d’une subtilité magnifiques, d’une finesse rare, sans scénario, sans rebondissement, sans récit, mais qui attache dès son entame. Avec sa propre petite musique qui peut paraître étouffée, mais qui n’est en tout cas pas si simple que ça, Sofia Coppola entraîne dans une foule de perceptions subtiles… (suite…)

Répulsion

dimanche, mars 9th, 2014

Glaçant.

Finalement et après tout je me demande si le dernier plan, sur quoi on a beaucoup glosé et qui pourrait être une explication du comportement de Carol (Catherine Deneuve) est si important que ça dans la qualité de Répulsion. Et à la réflexion, je me dis qu’il livre une explication peut-être trop facile, trop intellectuellement satisfaisante, de cette folie et de cette angoisse qui montent tout au long du film. Dès lors, l’inceste jadis subi, qui donne sens au regard fou porté, dans la vieille photo par Carol sur son père (on a toute faculté d’imaginer cela) serait une clef d’évidence, qui permettrait, d’une certaine façon, au spectateur de respirer et au réalisateur de justifier la démence exposée. (suite…)