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Argo

jeudi, février 13th, 2014

La bête aux trousses.

Voilà un film d’une parfaite efficacité dramatique, qui relate, sans doute en l’enluminant un peu, le tour de force de l’exfiltration de six diplomates étasuniens d’un Téhéran en ébullition et en haine anti-occidentale en novembre 1979. (suite…)

Les portes de la nuit

mardi, février 11th, 2014

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Ciel sans étoiles

Revoir encore une fois Les portes de la nuit, plonger dans le mélodrame, le brouillard sale, l’eau noire du canal de l’Ourcq, les gazomètres de la rue de l’Évangile, les désillusions de la Libération. Se dire que le chant du cygne du réalisme poétique et de la miraculeuse osmose Carné/Prévert (et Trauner et Kosma) est un ratage complet, mais un des plus beaux ratages de l’histoire du cinéma. (suite…)

Manon des sources (Pagnol)

jeudi, février 6th, 2014

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Quelle saveur ! Quel piquant !

À dire le vrai, Pagnol a déjà un peu perdu la main lorsqu’il réalise cette Manon des sources et il ne la retrouvera jamais vraiment. Ses chefs-d’œuvre absolus sont derrière lui : les interprètes de la grande époque sont morts, ou ont vieilli, l’innovation des décors naturels ne donne plus le même effet de grand air, les histoires sont sans doute un peu trop compliquées, ou moins attachantes que les merveilleux mélodrames d’auparavant. (suite…)

Le curé de Tours

vendredi, janvier 31st, 2014

La haine, le venin et la faiblesse.

Qui pourrait citer, de but en blanc, comme ça, sans y réfléchir un peu longuement, une demi-douzaine d’œuvres d’Honoré de Balzac convenablement adaptée pour l’écran ? Hein ? On s’étonne, parce que ce n’est pas la richesse romanesque, l’ampleur des intrigues, la caractérisation des personnages qui font défaut au grand écrivain, n’est-ce pas ? Parce que, même en n’en ayant que des souvenirs scolaires (enfin, du temps où on ne considérait pas les textes de slam ou de rap comme objets d’étude), même en ne se souvenant que d’avoir lu », on avait bien en tête pas mal de titres… (suite…)

Les trois mousquetaires

mercredi, janvier 29th, 2014

Hollywood on Seine

Si l’on parvient à s’abstraire du simplisme et du moralisme étasuniens, si l’on a envie de ne voir qu’un joli conte en couleurs virevoltant et rythmé, interprété par un Gene Kelly époustouflant en d’Artagnan et, entre autres, un Vincent Price qui donne du cardinal de Richelieu une image fausse mais très intéressante, on n’a pas lieu de résister au charme de ce tourbillon hollywoodien. Surtout si l’on veut y trouver ce qu’on cherche, une chorégraphie légère, bondissante, parfaitement mise en scène. (suite…)

En quatrième vitesse

lundi, janvier 27th, 2014

Surévalué, théâtral, lamentablement interprété.

Lorsque, après avoir vu le film, on en explore les suppléments, on est presque tenté, après avoir entendu l’exposé de Philippe Rouyer, de regarder à nouveau En quatrième vitesse, tant ce professeur paraît convaincant et semble pénétré de l’importance du film qu’il commente. Mais on se retient, parce qu’on trouve qu’on s’est tout de même plutôt ennuyé, et parce que cette histoire confuse et indécise, à l’invraisemblable conclusion, ne présente pas beaucoup d’intérêt. Et puis on songe aussi à l’épouvantable distribution, à des acteurs inconnus – ce qui n’est pas un reproche et peut être, quelquefois et souvent un atout – mais tous aussi dépourvus de charisme qu’une douzaine d’huîtres malades. C’est tout de même extraordinaire de disposer de personnages cyniques, brutaux, violents, prêts à tout, sans scrupules et de les présenter avec aussi peu de pertinence. (suite…)

Le parfum d’Yvonne

vendredi, janvier 24th, 2014

Modiano, enfin…

Qui se souvient aujourd’hui de cet été 1958 où un beau jour ma vie s’est mise à basculer ? Dès la première séquence du film, adapté de Villa triste, le ton inimitable, discret, léger, pénétrant de Patrick Modiano s’impose et on sent, et on voit par les premières images que Patrice Leconte a trouvé ce ton étrange, fascinant d’un des plus grands écrivains du dernier demi-siècle ?

Au delà de l’exactitude du récit (le film de Leconte ne prétend pas à la fidélité), son atmosphère, l’indécision de ces personnages, l’incertitude de leurs contours et jusqu’à leur fragilité…. (suite…)

Adorables créatures

mercredi, janvier 22nd, 2014

Polisson et charmant.

Ce délicieux petit film de Christian-Jaque ne pourrait évidemment plus être tourné aujourd’hui. Osez le féminisme, Les chiennes de garde, les Femen assiégeraient les cinémas où il serait présenté si jamais il avait pu être distribué, la pieuse dépendance au politiquement correct faisant partie des terrorismes les plus totalitaires qui se puissent.

Car Adorables créatures est d’une gracieuse misogynie. Mais qu’on ne s’y méprenne pas : Christian-Jaque est dans la veine de Sacha Guitry, narquois amoureux de la plus belle partie de l’Humanité… les femmes, je suis contre ; tout contre. Les femmes sont représentées dans la caricature la plus habituelle qui soit : bavardes, dépensières, cancanières, profiteuses, superficielles, coquettes, intéressées, irresponsables, monstres de duplicité… et absolument charmantes. Ce n’est naturellement pas dans la note de nos jours graves et sérieux. (suite…)

La prisonnière du désert

lundi, janvier 20th, 2014

Un western qui détonne.

À l’exception des exotiques (ceux de Leone), des baroques (ceux de Peckinpah) voire des parodiques (Three amigos), je n’apprécie pas tellement les westerns. Le genre me paraît souvent simpliste, manichéen, sans finesse, puéril même. Ces histoires de garçons vachers se fichant des roustes dans les saloons ou dans la poussière des corrals, ces pionniers chevauchant des heures pour fuir l’attaque d’Indiens fourbes avant d’être sauvés par la cavalerie fédérale, ces hommes trop rudes qui tombent amoureux de filles pleines de courage et de vertus ménagères m’ont toujours paru, passé l’âge de dix ans, illustrer ce propos qui faisait jadis florès : Les Américains sont de grands enfants. (suite…)

Caché

jeudi, janvier 16th, 2014

Mauvaise conscience.

Il me semble qu’il n’y a pas beaucoup, aujourd’hui, de réalisateur aussi intéressant que Michael Haneke. Et je n’écris pas cela parce qu’il a été deux fois récompensé de la Palme d’or cannoise (en 2009 pour Le ruban blanc en 2012 pour Amour) : on sait ce que valent les récompenses. Mais Haneke est le cinéaste d’un sidérant malaise, peut-être celui qui comprend le mieux les incertitudes de notre présent et les angoisses de notre avenir occidentaux.

Caché est d’une redoutable habileté. Le cinéaste piège à tout moment le spectateur en maniant en virtuose à la fois l’image, les mots et les souvenirs, en instituant les fausses pistes, en rendant la tension graduellement insoutenable jusqu’à faire espérer une sorte de révélation qui dévoilerait en un clin d’œil toute la mécanique du dispositif et en terminant le film par une séquence étonnante qui, bien loin de résoudre quelque question que ce soit, embrume encore davantage les esprits et fait ouvrir de vertigineux espaces. (suite…)