Nocturne américain.
Je crois que Jean-Pierre Melville
, qui avait un peu tâtonné pour trouver son style, mais avait enfin mis la main dessus et ne le lâcherait plus, s’est infiniment fait plaisir en tournant Deux hommes dans Manhattan
, en écrivant le scénario et les dialogues, en interprétant lui-même le personnage principal et en mettant en scène son Amérique rêvée, tout cela avec une éblouissante partition musicale écrite par Christian Chevallier et Martial Solal, aux accents d’un jazz souvent déchirant.
Cela étant posé, il faut bien admettre que les qualités principales de Melville
ne sont pas dans l’écriture ; et José Giovanni
, qui avait la dent dure, lui reprocha ainsi d’avoir porté trop en solitaire son dernier film, Un flic
en 1972, qui fut un échec cinglant. En revanche, quelle maîtrise admirable des ambiances, du rythme, des bruits (il y aurait tout un chapitre à faire sur les bruits extraordinairement présents de Deux hommes dans Manhattan
: bruit des téléscripteurs et des machines à écrire des bureaux de l’Agence France-Presse, bruit de la circulation automobile incessante de New-York, bruit de l’électrophone qui tourne à vide sur un microsillon lors de la découverte du corps de Fèvre-Berthier). (suite…)