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Anne des mille jours

samedi, septembre 8th, 2018

Perfide Albion !

Lorsque j’étais un tout petit garçon – ce qui remonte presque à avant le Déluge ! – , j’étais absolument persuadé que le modèle du terrifiant personnage de Barbe-bleue, le monstre sanguinaire du conte de Perrault était évidemment Henry VIII d’Angleterre. Comme un parfait exemple d’inimaginables débauches, ma mère me citait la torrentueuse litanie des six épouses du gros Roi (178 kilos à sa mort), faisant naturellement abstraction de ses nombreuses maîtresses. Elle en profitait, naturellement, pour insuffler à notre cœur vaillant la méfiance envers le Godon, qui depuis Jeanne d’Arc et jusqu’à Mers-el-Kébir, en passant par Waterloo et Fachoda, n’a jamais été en odeur de sainteté chez nous. Le terrifiant glouton était le parfait repoussoir dont nous avions besoin. Ce n’est que bien plus tard que j’ai entendu parler de Gilles de Rais, seigneur de Tiffauges et compagnon de Jeanne d’Arc dont les crimes sanglants dépassent de beaucoup les vaticinations amoureuses du souverain Tudor. (suite…)

La fête à Henriette

mardi, septembre 4th, 2018

Un caprice parisien.

Voilà un film très curieux, très inhabituel, très original, mais qui ne trouve qu’à demi sa place dans la filmographie du grand Julien Duvivier, qui est à mes yeux, par la permanence et la hauteur de son inspiration, le plus grand cinéaste français, avant même Henri-Georges Clouzot et Jacques Becker. Un film qui n’a que peu à voir avec l’auteur noir et souvent accablant de La belle équipeLa fin du jourPaniqueSous le ciel de Paris. Un film qui, certes, perpétue temporellement la veine légère et assez souriante du Petit monde de Don Camillo mais qui paraît tout de même un peu artificiellement conçu. Je gage, d’ailleurs, que d’il n’était pas signé par ce réalisateur incontournable, il aurait un peu disparu des esprits, alors qu’il y survit par l’étrangeté de sa construction. (suite…)

L’Impératrice rouge

vendredi, août 31st, 2018

Du sang, de la volupté et de la mort.

1934. Au Kremlin règne Staline et on ne peut certainement pas penser que les studios hollywoodiens, pas davantage que le juif viennois Jonas Sternberg – qui s’appelle désormais Josef von Sternberg – aient une particulière sympathie pour lui. Et puis, d’ailleurs, on se demande si l’immense Russie a jamais été comprise par qui que ce soit, sinon un peu par la France, qui partage avec elle un profond ancrage monarchique. Mais la Russie c’est encore différent, c’est le pays du despotisme plus ou moins éclairé, mais absolument indissociable de ses grandes heures : rien qui soit admissible à un libéral. D’où la présentation du pays, au début de L’impératrice rouge comme une sorte d’enfer de tortures où, depuis Ivan le Terrible et Pierre le Grand des souverains buveurs de sang prennent plaisir à martyriser leur peuple. Les premières images du film sont d’ailleurs assez étonnantes : scènes de supplices divers, de viols et de rapines, knout, pal, brodequins, sarcophages de bronze, décapitations et tout le toutim. Une représentation de l’Enfer ne serait pas plus terrible.

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Mission Impossible 3

mercredi, août 29th, 2018

Une ténébreuse affaire.

Je ne souhaite pas particulièrement jouer à l’imbécile, à l’endormi ou au retardé mental, mais je ne suis pas certain d’avoir tout compris des péripéties nombreuses et fumeuses qui se succèdent tout au long de Mission Impossible 3. À dire vrai, je pense que la compréhension des spectateurs est vraiment le cadet des soucis des fabricants de cinéma qui, depuis de nombreuses années, proposent ce genre de spectacles. Il ne s’agit pas de donner à voir une intrigue subtile et menée avec finesse, mais d’éblouir le quidam à coup de séquences furibardes dans un montage ultra-violent, saccadé, haletant, qui ne permet pas à un individu d’intelligence moyenne de se retrouver au milieu d’un charivari fascinant. (suite…)

Quelle drôle de gosse

lundi, août 27th, 2018

Pantalonnade insignifiante.

Yves Mirande, qu’on pourrait, dans un mauvais jour qualifier de Guitry de second choix, n’était pourtant pas un mauvais auteur dramatique, comme le prouvent (avec des nuances), BaccaraCafé de ParisLes petits riens. Il a même été le dialoguiste de Circonstances atténuantes et un des scénaristes de Carnet de bal. Théâtreux passé ensuite au cinéma, il a récolté, sur les scènes et les écrans, quelques beaux succès dont tous n’étaient pas immérités. Disons alors que Quelle drôle de gosse fait partie de ses ratages et que cette petite comédie courte (85 minutes) qui ne décolle jamais, ne méritait pas d’être exhumée de l’oubli où elle avait sûrement sombré. (suite…)

L’homme à la Buick

samedi, août 25th, 2018

Honfleur jungle.

Dès que l’on apprend que c’est Jean Gabin et non Fernandel qui devait interpréter Armand Favreau, le personnage principal de L’homme à la Buick, on comprend mieux ce qu’on pourrait appeler la raison d’être du film qui, tel qu’il nous apparaît, n’en a aucune ou plutôt une raison si bizarre qu’elle décontenance complétement. Parce que voir Fernandel séduire la délicieuse veuve noire Michèle de Leyrac (Danielle Darrieux), c’est tout de même un des chocs les plus puissants que j’ai ressentis en 65 ans de cinéphagie.

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Le placard

vendredi, août 24th, 2018

Boîte à outils.

On sentait déjà venir en 2001, au moment où Le placard est sorti sur les écrans, l’ombre terrifiante du pire politiquement correct, ce rideau sombre qui empêchera à l’avenir de confier à un Noir un rôle autre que celui de chef ou de président, à un infirme celui d’un sale type et à une obèse celui d’une souillon. Les minorités agissantes et glapissantes sont tellement parvenues à imposer leur doxa que le balancier discriminant de jadis s’est niché complétement dans l’autre sens et va y rester quelques décennies. Peut-être, sans doute, est-ce là une punition méritée pour ceux qui se sont, pendant longtemps, gaussé des négros, des estropiés et des grosses, mais c’est chèrement payé pour la qualité des œuvres. (suite…)

Beetlejuice

mercredi, août 22nd, 2018

Accroche-toi au pinceau, je retire l’échelle !

Ce premier film du singulier Tim Burton passe pour une de ces œuvres-culte que beaucoup de ceux qui les découvrent citent à tout bout de champ. De fait, en 1988, lorsque Beetlejuice est sorti sur les écrans, on pouvait bien se rendre compte que le réalisateur avait en lui une cinglerie tout à fait particulière, originale et séduisante. Si les araignées ne sont pas rares dans les placards de beaucoup de cinéastes, toutes n’ont pas les couleurs mordorées de cette histoire échevelée de bienveillants fantômes. Histoire qui oscille constamment entre l’horreur et le comique, mais qui, à mes yeux, joue insuffisamment sur l’un ou l’autre. (suite…)

La loi c’est la loi

mardi, août 21st, 2018

Affaires étrangères.

On imagine que les producteurs, toujours friands de recettes faciles (aux deux sens de ces termes et après tout ils sont là pour ça !), que les producteurs, donc, se sont dit que mettre en face à face deux grandes vedettes, française et italienne, était une bonne idée. Après les immenses succès des trois premiers Don Camillo (1951,53 et 55), il devait être tentant, en effet, de reconstituer un duo presque exotique de cette sorte. Fernandel, évidemment, gage de succès assuré de ce côté des Alpes et Toto,moins connu ici, mais très populaire là. C’est sans doute la base, l’idée initiale. (suite…)

Week-end de terreur

vendredi, août 17th, 2018

Sept petits nègres.

Week-end de terreur se situe au confluent de plusieurs riches veines romanesques et cinématographiques. Celle de l’élimination graduelle des protagonistes par une mystérieuse main assassine, dévoilée seulement à la toute fin de l’ouvrage. Mais aussi celle des adolescents fêtards du Nouveau Monde qui sont invités par une condisciple à passer un bon moment dans une très belle propriété isolée. Et encore celle de la gémellité et de la folie. Et on pourrait ajouter par dessus le marché celle des doubles retournements (je ne puis en dire plus sur ce dernier point sauf à dévoiler trop crûment l’astuce terminale). (suite…)